La convention collective nationale applicable individuellement est celle écrite dans les documents contractuels du salarié...


https://www.unsa.org/2829

Par cet arrêt en date du 5 juillet 2023, la Cour de cassation tranche une problématique relative à la convention collective applicable en tout ou partie aux salariés de l’entreprise. Or, la convention collective nationale dont se réclame celle-ci n’est pas forcément celle mise en oeuvre pour tous ses salariés...
L’arrêt de la Cour de Cassation invite à aller plus loin dans l’analyse des dispositions qui s’appliquent effectivement...

JURISPRUDENCE SOCIALE DE LA COUR DE CASSATION :

A propos de l’arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet 2023 n°22-10.424
https://www.courdecassation.fr/decision/64a50ab2b8594705dbfcc858

° DECISION DU JUGE :

Si, dans les relations collectives de travail, une seule convention collective est applicable, laquelle est déterminée par l’activité principale de l’entreprise, dans les relations individuelles, le salarié, à défaut de se prévaloir de cette convention, peut demander l’application de la convention collective mentionnée dans le contrat de travail.

La référence dans le contrat de travail de la convention collective des agences de presse vaut ainsi reconnaissance de l’application de la convention à l’égard du salarié.

° FAITS

Un travailleur a été engagé en tant que reporter-photographe par contrat de travail à temps partiel conclu le 1er janvier 2014 par la société Agence de presse et reportages hippiques pour une durée mensuelle de cinquante-six heures. Le 11 décembre 2017, il a saisi la juridiction prud’homale de demandes se rapportant à l’exécution du contrat de travail.

° PROCEDURE

La Cour d’appel d’Amiens a rejeté sa demande en jugeant que la convention collective qui lui est applicable est la convention collective nationale de travail des journalistes et non celle des employés des agences de presse, ce qui empêche la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet ou à titre subsidiaire en un contrat à temps partiel de vingt-quatre heures hebdomadaires. Cela limite également à certaines sommes le versement des indemnités demandées relativement à la prime de 13e mois, à la prime d’ancienneté, et à l’indemnité au titre de l’amortissement et l’utilisation de son matériel photographique personnel.

Pour cela, la Cour d’appel a décidé que le juge doit, pour déterminer la convention collective dont relève un employeur, apprécier concrètement la nature de l’activité qu’il exerce à titre principal sans s’en tenir à ses statuts, ni aux mentions figurant au contrat de travail ou sur des bulletins de paie et autres documents de l’entreprise. Également qu’il n’est pas utilement contredit que la société exerce à titre principal son activité dans le domaine des courses hippiques, employant des reporters-photographes pour se constituer une banque d’images et vendre les reportages réalisés à différents clients, donc les salariés recrutés sont soumis à la convention collective du travail des journalistes.

- La question qui se pose dans ce cas est de savoir quelle est la latitude de l’entreprise pour décider d’appliquer une convention collective à ses salariés ?

° ECLAIRAGES

La Cour de cassation a donné raison au salarié en jugeant que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Si, dans les relations collectives de travail une seule convention collective est applicable, laquelle est déterminée par l’activité principale de l’entreprise, dans les relations individuelles, le salarié, à défaut de se prévaloir de cette convention, peut demander l’application de la convention collective mentionnée dans le contrat de travail.

En statuant ainsi, alors que la référence dans le contrat de travail à la convention collective des agences de presse valait reconnaissance de l’application de la convention à l’égard du salarié, la cour d’appel n’a pas respecté les dispositions légales.

Concernant la requalification du contrat de travail, la Cour de cassation a confirmé que la Cour d’appel avait eu raison de débouter le salarié de sa demande.

Concernant les sommes demandées par le salarié, elles l’étaient sur le fondement de la convention collective dont il contestait l’application, celle des journalistes. Le fait qu’on lui ait donné raison sur la convention collective, en lui appliquant celle des employés des agences de presse, rend de fait caduque cette demande (sauf l’indemnité pour l’amortissement et l’utilisation du matériel photographique due en application du contrat de travail, sans rapport avec la Convention collective).

Ainsi, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel, mais seulement en ce qu’il dit que la convention collective applicable est la convention collective nationale de travail des journalistes.

° FONDEMENTS JURIDIQUES DE LA DECISION ?

Le point essentiel de cet arrêt est donc de préciser que le salarié peut se prévaloir de la Convention collective inscrite sur son contrat de travail, même si elle diffère de celle de l’entreprise.

Cette jurisprudence fait suite à d’autres, comme par exemple celle selon laquelle « si, dans les relations collectives de travail, une seule convention collective est applicable, laquelle est déterminée par l’activité principale de l’entreprise, dans les relations individuelles, le salarié peut demander l’application de la convention collective mentionnée sur le bulletin de paie ; que cette mention vaut présomption de l’applicabilité de la convention collective à son égard, l’employeur étant admis à apporter la preuve contraire » - Cass. Soc, 15 novembre 2007 n°06-44.008.

Bien que, pendant longtemps, une telle mention constituait seulement un indice de la volonté de l’employeur d’appliquer cette convention, les juges du fond devant rechercher l’intention de l’employeur (Cass. Soc, 10 avril 1991 n°87-45.375).

° DROIT EN ACTIONS

L’arrêt confirme donc le changement jurisprudentiel abordé a la fin des années 1990 et par l’arrêt de 2007 pour les bulletins de paie, en le transposant au contrat de travail.

Auteur, Louis BERVICK, Juriste en droit social, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA.

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