Pas besoin d’être "représentatif" pour un syndicat pour défendre les salariés...
La représentativité syndicale n’est plus une condition pour désigner un défenseur syndical...
Répondant à une question prioritaire, le Conseil Constitutionnel pose que les dispositions de l’article L. 1453-4 alinéa 2 du code du travail, qui prévoient que "seules les organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multi-professionnel (ou dans au moins une branche) ont la possibilité de proposer une liste de défenseurs syndicaux" ne sont pas conformes à la Constitution...
Une décision du Conseil constitutionnel qui bouge les lignes de l’action syndicale...
Cons. const., déc. 14 sept. 2021, n° 2021-928 QPC : JO, 16 sept.
https://www.legifrance.gouv.fr/down...
QUESTIONS DE DROITS
La Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière (CNT-SO) a posé une Question prioritaire de constitutionnalité dans le cadre de son action en justice devant le Conseil d’État.
Son action initiale avait pour objet de faire annuler la décision d’une direction régionale du travail déclarant "irrecevables", les propositions de candidatures de ce syndicat à la fonction de défenseur syndical , "faute de représentativité de l’organisation syndicale".
Questions posées : les règles du code du travail distinguant "représentativité" et "non représentativité" n’étaient - t’elles pas de nature à créer une inégalité de traitement entre organisations syndicales contraire à la Constitution ? De quel droit la représentativité acquise par un résultat électoral pouvait "réserver" un droit d’agir à quelques syndicats ? En quoi cette même représentativité est le gage d’une meilleure défense des salariés ? Telles étaient les questions posées aux "sages" du 2 rue Montpensier...
La CNT-SO dont les audiences se situent sous le seuil de 8 % soutenait que la condition légale de représentativité méconnaît le principe constitutionnel d’égalité devant la loi... Le syndicat aurait d’ailleurs pu ajouter que l’égalité
ÉCLAIRAGES
Face aux membres du Conseil constitutionnel, le représentant du Ministre a défendu que la différence de traitement entre les organisations syndicales se justifie au regard de trois raisons objectives :
- L’exigence de représentativité s’explique au regard du risque important d’accroissement des consultants privés, en dehors de la profession d’avocat et sous couvert de la création d’un syndicat, à des fins purement lucratives ;
- Le législateur a souhaité assurer la garantie des droits des salariés défendus par une organisation syndicale répondant notamment aux critères de transparence financière, d’indépendance et du respect des valeurs républicaines ;
- En permettant aux seules organisations syndicales représentatives de désigner une défenseur syndical, c’est s’assurer un bon usage des deniers publics (les temps de défense étant en partie indemnisés).
La Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière s’oppose à ces arguments. Elle a rappelé que la représentativité d’un syndicat vient mesurer ses résultats électoraux et ainsi sa capacité à mener à bien la négociation collective et signer des accords collectifs.
La défense du salarié devant le Conseil de prud’hommes porte, en revanche, sur l’intérêt individuel du salarié et l’aspect collectif en est écarté. Les critères de représentativité ne garantissent pas la compétence juridique et humaine nécessaire du défenseur syndical.
En conclusion, la différence de traitement entre les organisations syndicales représentatives et non représentatives ne se justifie pas !
FONDEMENT JURIDIQUE :
Le Conseil constitutionnel considère qu’en adoptant ces dispositions relatives aux conditions de désignation des défenseurs syndicaux, le législateur a entendu améliorer l’efficacité et la qualité de la justice prud’homale.
Il souligne que l’audience électorale d’une organisation syndicale ne traduit pas sa capacité à désigner des candidats aptes à assurer l’assistance et la représentation des salariés en justice.
Dès lors, la différence de traitement établie entre les organisations syndicales représentatives et les autres organisations syndicales est contraire à la Constitution car elle n’est pas justifiée par un motif d’intérêt général et est sans rapport avec l’objet de la loi.
DROITS EN ACTIONS
Cette décision a pour effet de réécrire la loi et le code du travail avec l’abandon de la condition de "représentativité". Signe que le droit est bien vivant et jamais intangible... Le bon sens peut toujours prévaloir et rétablir l’égalité des traitements devant la loi et en exécution de celle-ci.
Plus concrètement pour la défense des droits individuels des travailleurs, elle repositionne les acteurs de l’assistance syndicale et juridique des salariés dans les contentieux prud’homaux. Elle va se traduire par l’arrivée de nouveaux défenseurs syndicaux.
Nul doute que l’UNSA a un rôle majeur à jouer dans la désignation, l’accompagnement et la formation de ses praticiens du droit, missions que le pôle formations juridiques du secteur juridique national de l’UNSA développe depuis toujours.
Auteure : Sophie RIOLLET, Juriste Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National, UNSA BAGNOLET.
Pour visionner le FILM DES DEBATS en Conseil constitutionnel :
le LIEN vers la page décision du Conseil constitutionnel et la vidéo du FILM en bas de page :
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