Définition des établissements distincts dans un Groupe et une UES, quand tout le monde s’en mêle...


https://www.unsa.org/1977

Rôle des différents acteurs, délégués syndicaux, CSE, Employeur, administration, juge, ... qui a le dernier mot !?
S’agissant de la fixation des établissements distincts d’une unité économique et sociale, en lien avec un groupe de sociétés... La négociation collective prévaut !

JURISPRUDENCE SOCIALE

Cass., soc., 17 mars 2021, n° 19-21.057
https://www.courdecassation.fr/juri...

Les Faits...

Depuis 2004, au sein du groupe de sociétés Randstad est conclu un accord portant création d’une UES, dans laquelle ont été négociés des accords portant création d’établissements distincts, pour la mise en place d’instances de représentation du personnel.
Lors des dernières négociations collectives, les parties n’ont pu s’entendre sur leur nombre.

Prenant acte de l’impossibilité de conclure, la société Groupe Randstad a unilatéralement fixé en octobre 2018 à 11, le nombre d’établissements distincts au sein de l’UES.

Cette décision a été contestée par la CGT auprès de l’inspection du travail, laquelle a décidé de fixer le nombre d’établissements à 9.

En réaction, la CGT a saisi le tribunal d’instance aux fins d’annulation tant de la décision administrative que celle de l’employeur afin qu’il y ait à nouveau ouverture des négociations.

N’ayant pas obtenu gain de cause, elle a saisi la Cour de cassation. Mais en août 2019, toutes les organisations syndicales représentatives de l’entreprise, exceptée la CGT, ont négocié et conclu un accord reprenant les éléments de décision de l’inspection du travail.

L’ANALYSE DE LA COUR DE CASSATION

La validité de l’accord pouvant avoir pour effet de priver d’objet le recours formé par la CGT, les juges ont eu à se demander si l’accord négocié postérieurement à une décision administrative portant sur le même sujet peut être considéré comme valable.

De façon sommaire, la Cour de cassation pose le principe selon lequel un accord collectif "fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein de l’UES a eu pour effet de rendre caduque la décision" antérieure de l’inspection du travail portant sur le même objet.

Le simple fait que la négociation se soit tenue postérieurement à la décision administrative suffit à la faire primer sur cette dernière et surtout à la priver d’effet pour l’avenir.

En résulte inévitablement un rejet du pourvoi formé par la CGT sur les décisions en cause. Celles-ci étant devenues caduques, le pourvoi disparait.

ECLAIRAGES

Selon l’article L.2313-8 du Code du travail, le choix du périmètre des instances de représentation du personnel relève de la compétence des délégués syndicaux, à titre principal et, des représentants élus au CSE, à titre subsidiaire, en l’absence de DS dans l’entreprise.

Si l’on suit l’articulation de ce même article L.2313-8, ce n’est qu’à défaut de conclusion que l’employeur pourra agir par voie unilatérale. C’est somme toute logique.
Néanmoins, et c’est là le troisième temps de l’article, si malgré l’échec des négociations et la décision unilatérale déterminant les périmètres d’implantation des CSE, la contestation subsiste, alors il est permis de saisir l’inspection du travail.

Cette action vise deux conséquences :
• La remise en cause ainsi que l’annulation de la décision unilatérale,
• L’établissement de nouveaux périmètres.

La décision de l’administration du travail d’annuler l’acte unilatéral de l’employeur n’a pas pour conséquence de renvoyer les parties à négocier un nouvel accord. Dès lors qu’il y a saisine de l’inspection du travail, son auteur choisit de s’en remettre à elle pour décider du périmètre. Il est également à noter que l’article ne donne aucune précision sur les personnes pouvant contester la décision unilatérale. Il pourra s’agir donc de toute personne qui y a intérêt...

Enfin, et c’est le 4e temps, le texte prévoit que si le mécontentement subsiste une fois la décision rendue par la DREETS, alors seulement la contestation pourra être portée devant le juge. Comme il s’agit d’un contentieux portant à la fois sur un processus de négociation et sur les élections professionnelle, l’article L.2313-8 précité prévoit une compétence exclusive du juge judiciaire.

Si l’on applique ce raisonnement à l’arrêt du 17 mars 2021, toutes ces étapes ont bien été suivies : échec des négociations, suivie d’une décision unilatérale, puis prise d’un acte administratif finalement action en justice.

Le juge reprenant le sens de l’article L.2313-8 du Code du travail, n’a fait que constater que, sur cette question, le législateur a souhaité que les actes négociés priment sur toute autre forme d’acte. A partir du moment où un accord a pu être négocié, il rend ce qui précède caduc.
Le contenu de l’accord nouvellement conclu ""importerait peu"". Ici il n’a fait que reprendre les dispositions de l’acte administratif, mais ce point n’a volontairement pas été relevé par le juge.

DROITS EN ACTIONS...

Pour les délégués syndicaux : la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts est soumise à la conclusion d’un accord dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 2232-12 du Code du travail.

Pour que l’accord soit valide, il est donc nécessaire qu’il ait été signé par une ou plusieurs organisations syndicales ayant obtenu plus de 50 % des suffrages, lors du premier tour des dernières élections professionnelles. Il n’est ainsi pas permis de faire valider ce type d’accords par voie référendaire, dès lors qu’il n’aurait obtenu qu’entre 30 et 50 % des suffrages par ses signataires.

Dans l’affaire en cause, le syndicat à l’origine de la saisine est également le seul ayant refusé la signature de l’accord.

Vaut-il mieux un mauvais accord que pas d’accord du tout ?
Sur cette question en tout cas, il est permis d’hésiter. Ce point de droit est éminemment du ressort des partenaires sociaux et qu’il doit absolument faire l’objet d’une discussion entre toutes les parties à la négociation afin de parvenir à un consensus. Tout blocage sur ce point aura des conséquences sur la représentation professionnelle dans l’entreprise.

Pour les représentants du personnel : la négociation d’un accord portant sur le nombre et le périmètre des établissements d’une unité économique et sociale sera engagée avec les membres du CSE si aucun accord collectif n’ait été conclu par des délégués syndicaux et, s’il n’y a plus de délégués dans l’entreprise.

Cette double condition peut sembler assez surprenante, mais elle vise à empêcher qu’une pression trop grande ne soit exercée par l’employeur. S’il en allait autrement, il pourrait être privilégié une négociation hors l’appareil syndical en refusant de conclure avec les délégués syndicaux, pour ne finalement souhaiter la négociation qu’avec les membres du CSE.

Si les négociations sont engagées sur ce fondement, alors l’accord en découlant sera valide s’il est adopté à la majorité des membres titulaires élus. Cela implique que le taux de validité n’est pas évalué en fonction du nombre de membres présents mais bien au regard du nombre de ceux ayant été élus lors des dernières élections professionnelles.

POUR ALLER PLUS LOIN...

Cet arrêt permet d’illustrer trois problématiques portant sur la notion et mise en place de l’UES, de la mise en place en son sein des instances de représentation, mais également de la concomitance entre le groupe et l’UES.

I. Approche générale de la notion d’unité économique et sociale :
II. Différences entre l’UES et le groupe :
1. Différence de périmètre
2. Différence de finalité
III. Mise en place d’établissement distincts :

Auteur, Michel PEPIN, Juriste droit social, Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA, BAGNOLET.

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