Dossier CSE : indemnités kilométriques et déplacements des membres, attention à la requalification en élément de rémunération...


https://www.unsa.org/2295

Maîtriser le budget déplacement des membres du CSE dans le cadre des réunions légalement obligatoires et pour la gestion des activités sociales et culturelles, un enjeu de mandat responsable ! C’est ce que rappelle ce dossier relatif au traitement notamment fiscal des déplacements des membres du CSE...

Si vous êtes notamment membres UNSA d’un CSE dans lequel vous êtes minoritaire et que ni le secrétaire du CSE, ni son président, ni le trésorier ne veulent inscrire ce point à l’ordre du jour d’une réunion du CSE, ou le trésorier ne joue pas le jeu de la communication et de la transparence, vous pouvez toujours ès qualité de membre (UNSA) d’un CSE, agir et intervenir auprès des administrations ou des interlocuteurs que le bureau du CSE pourrait ou devrait solliciter, mais ne le fait.

Chaque membre du CSE pouvant collectivement voir sa responsabilité engagée, il n’est nullement empêché ou il ne lui est pas interdit, c’est même un devoir et une responsabilité militantes, de prendre des informations auprès d’instances et administrations, d’être constructif ou préventif des mauvaises pratiques, notamment d’autres membres et souvent relevant d’une autre étiquette, dans des relations parfois conflictuelles.

Ces interventions ont souvent pour effet de finir par sensibiliser la présidence du CSE, d’autres membres, la RH, l’expert-comptable ou le commissaire aux comptes. Et ce, avant même que de saisir l’inspection du travail ou les juges…

Rescrit fiscal ou social ou demandes d’informations et de position à l’administration fiscale sur le traitement fiscal des déplacements

Les questions qui se posaient : quelles règles s’appliquent aux remboursements des frais de déplacements des membres du CSE, en l’espèce, utilisant des véhicules personnels n’appartenant pas à l’entreprise, leur propriété ou celle de leurs proches… ?

Certains membres éloignés de l’entreprise faisaient plus 5000 kilomètres par an pour les œuvres sociales et culturelles, sans que rien de très précis ne soit prévu par le règlement du CSE, appliquant intuitivement le dispositif des indemnités kilométriques et le barème fiscal plafonnant des montants d’indemnités de remboursements de frais exonérés de fiscalité sociale et de taxes…

Saisie par ses adhérents, l’UNSA avait invité ses représentants du CSE, dans une démarche d’amélioration continue, sans aller jusqu’à mettre en défaut leurs collègues, à exercer un recours de même nature que le rescrit fiscal de l’article L. 80B du code des procédures fiscales ou de poser une question fiscale à l’administration des impôts.

Es qualité de membres du CSE et du syndicat UNSA, ils ont interrogé l’Administration, dans l’intérêt du bon fonctionnement du CSE, de la bonne utilisation des subventions et au titre de la responsabilité collective des membres du CSE en cas de manquements aux obligations légales et fiscales.

L’objectif de la demande était aussi d’optimiser la gestion des dépenses du CSE et de définir un cadre de prises en charge éthique et responsable des frais, dans un accord collectif d’entreprise, le règlement intérieur ou à défaut via des projets de notes/motions de procédure de gestion comptable des déplacements approuvées par le CSE.

Rappel du contexte des déplacements du CSE

De fait, les membres du CSE, amenés régulièrement à se déplacer avec leur véhicule personnel ou des véhicules n’appartenant pas au CSE ou à l’entreprise, dans l’exercice de leurs missions représentatives élues du personnel, le font et se déplacent soit au titre des obligations légales de l’entreprise (L. 2315-21, L. 2315-27, R. 2315-23 et suivants du Code du travail), soit en raison de nécessaires déplacements liés à l’exercice des activités/œuvres sociales et culturelles (notamment, L. 2312-78 et R. 2312-35 et suivants).

Dans la mise en œuvre des activités sociales (œuvres sociales et culturelles) du comité social et économique, les membres déterminent eux-mêmes, sous la responsabilité collective du bureau du comité et des membres de leur institution leurs déplacements, aux bonnes fins de leurs activités sociales.

Dans leur fonction de membres du CSE, les élus et membres du bureau du CSE ne sont plus liés, à proprement parler, par un « lien de subordination » et n’agissent plus en tant que salariés d’une entreprise « employeur » ou du CSE, mais en tant que (en quelque sorte) « mandataires de gestion » d’une institution représentative du personnel de l’entreprise.

Leur « mandant » est le comité social et économique, car élus, ils ne sont pas davantage ni les mandataires du personnel qu’ils représentent au terme d’un processus électoral et d’un vote, ni ceux du syndicat, si celui-ci, lorsqu’une section syndicale existe dans l’entreprise ou l’établissement, a déposé une liste aux élections professionnelles les portant à être élus sous étiquette du syndicat (en tant qu’élu, ils restent indépendants du syndicats et autonomes dans leur gestion) ...

Quelles limites à l’engagement des frais ? Réponse de l’administration fiscale…

L’administration fiscale a répondu aux différentes questions. Elle commence par considérer que tout remboursement qui serait indu constituerait pour le membre du CSE indélicat une rémunération imposable.

Les règles applicables à l’entreprise en matière d’exonération sont transposées aux déplacements des membres. Sont donc concernés, par exemple, sur justification de carte(s) grise(s), les seuls véhicules dont le salarié lui-même ou, le cas échéant, son conjoint ou l’un des membres de son foyer fiscal est propriétaire ou copropriétaire ?

Pour bien comprendre, il faut pouvoir se référer aux textes et à la jurisprudence…

Le comité social et économique dispose, pour une part de son budget légal, de ressources destinées à son fonctionnement.

Il y a donc lieu de distinguer :

  • les obligations du comité social et économique concernant les avantages qu’il alloue aux salariés de l’entreprise de ses obligations sociales liées aux rémunérations qu’il verse à son propre personnel salarié ou à ses membres pour son fonctionnement.

C’est à l’employeur, et non au CSE, qu’il incombe la responsabilité des déclarations et du versement des cotisations sociales afférentes aux avantages alloués par son comité social et économique au personnel ne bénéficiant pas d’une mesure d’exonération (ex. budget maximum des prises en charges exonérées annuel par salarié). Pour que l’employeur soit en mesure de remplir ses obligations, le CSE doit lui communiquer les éléments nécessaires à la déclaration et au calcul des cotisations.

Et ne serait-ce que pour ce traitement social des œuvres sociales et culturelles du CSE, en cas de contrôle de la gestion sociale de l’entreprise par l’Urssaf, le CSE est tenu de mettre à la disposition de l’entreprise les documents comptables nécessaires à la réalisation du contrôle et doit être en capacité de produire une comptabilité détaillée assortie de justificatifs (L. 2315-64 du code du travail et article 123-12 du code de commerce). Les budgets de fonctionnement au titre des obligations et missions de consultations et de celles de gestion des œuvres sociales devant être distincts (les subventions versées par l’entreprise étant également distinguées).

L’Administration fiscale se fonde sur les normes comptables :

  • le règlement n° 2021-05 du 3 septembre 2021 relatif aux comptes annuels des comités sociaux et économiques ;
  • le règlement n° 2021-06 du 3 septembre 2021 relatif aux documents comptables des comités sociaux et économiques ;
  • le règlement n° 2021-07 du 3. 09. 2021 relatif aux comptes consolidés des comités sociaux et économiques. Les articles L. 131-1 et L. 131-2 de l’arrêté du 22 novembre 2021 portant homologation des règlements précités de l’Autorité des normes comptables.

Le CSE « employeur » est responsable des déclarations et du versement de cotisations sociales.

  • Réponse de l’administration fiscale : toutes les heures de missions dans le cadre d’un CSE sont à considérer et à traiter socialement et fiscalement, à l’égard du CSE, au même titre que des heures de travail rémunérées que réaliseraient des salariés du CSE. A ce titre, aux dépenses liées au fonctionnement du CSE (de ses membres), légales obligatoires dans le cadre des réunions ou celles relevant de l’exercice d’activités sociales et culturelles, s’applique le régime de prise en charge des frais professionnels et des indemnités kilométriques des salariés.

Pour préciser encore, c’est le régime de prise en charge des frais et des rémunérations des travailleurs salariés d’un CSE qui va s’appliquer à l’égard de ses membres, si les dépenses dépassent les plafonds d’exonérations ou si elles sont injustifiées. Il y a identité du régime et du traitement des frais et des sommes versées, mais ce sont bien le patrimoine, la comptabilité et le budget du CSE qui sont concernés, dans l’exécution conforme ou non des fonctions et missions du CSE, par ses membres en charge des activités (c’est bien le CSE qui engage sa responsabilité (le trésorier et ses membres) sur sa gestion et comptabilité des frais et non l’entreprise (L. 2312-78 du code du travail) ; ce qui ne signifie pas l’impossibilité, pour toute personne qui y a intérêt, de rechercher et d’engager la responsabilité solidaire de l’entreprise en cas de fraude ou d’entrave).

  • Aussi, les sommes et règlements que perçoivent les membres du CSE à l’occasion de leurs fonctions et travaux peuvent également être considérées, côté membres actifs du CSE, comme des rémunérations et sont intégrables, chaque année, dans l’assiette de leur revenu imposable (rubriques salaires /traitements), sauf à être traitées comptablement, juridiquement et fiscalement comme des frais professionnels (pour rappel, selon la doctrine fiscale, toute somme perçue est par nature un revenu imposable et fiscalisable, sauf traitement notamment en tant que remboursements de frais).
    Lors de sa déclaration d’impôt ou en cas de contrôle fiscal, le membre du CSE peut déduire de son revenu imposable ces frais professionnels.

Les sommes perçues à l’occasion du travail ou dans le cadre de l’exécution de celui-ci, y compris pour des missions pour le CSE sont soumises à l’impôt sur le revenu après déduction des frais professionnels (dépenses de transport du domicile au lieu de travail, restauration sur lieu d’activité, frais de documentation et de mise à jour des connaissances, etc.).

Il y a toutefois un choix possible à faire au moment de la déclaration d’impôt entre la déduction forfaitaire de 10 % et la déduction des frais professionnels pour leur montant réel.

La déduction forfaitaire de 10 % est automatiquement calculée sur les sommes perçues pour tenir compte des dépenses professionnelles courantes liées à l’activité (plafonds par foyer fiscal). Mais les sommes perçues sont bien par nature imposables hors cette possible déduction.

Si la déduction de 10 % ne couvre pas les frais, il est possible alternativement de déduire les frais professionnels pour leur montant réel, en considération néanmoins des barèmes fiscaux pour ceux prévus.
Les dépenses (frais de transport domicile - lieu de travail (texte), frais de repas (détail), déplacements professionnels (indemnités kilométriques, montants), frais de formation, équipements professionnels, etc.) doivent avoir servi à l’activité du CSE professionnelle, être payées pendant l’année d’imposition, être justifiées (attestant la réalité et le montant des frais).

La déduction des frais réels de l’ensemble des sommes perçues au titre du travail, entreprise et CSE s’appuie, s’agissant des frais de déplacement et d’indemnités kilométriques sur les barèmes kilométriques de l’administration qui prévoient une modalité de calcul et un plafond, que les barèmes soient mentionnés et convenus expressément par le CSE ou pas. Dans ce dernier cas, en cas de contrôle fiscal, l’administration prend en compte les montants attachés à chaque tranche du barème.

S’agissant de frais réels déductibles ou pris en charge par le CSE, seuls les frais de véhicules dont on est propriétaire ou dont assume en propre les charges (notamment d’entretien) peuvent être pris en compte.

S’il y a une location de véhicule auprès d’un professionnel, utilisation par emprunt d’un véhicule d’un tiers au foyer fiscal (famille élargie hors foyer fiscal, voisin, entreprise, etc.), sans prise en charge de dépenses, il n’est bien sûr pas possible de déduire des frais dont on n’a pas la charge et, l’avantage tiré de cette utilisation sans charges pourra être estimé et chiffré et réintégré dans le montant des sommes perçues, imposables sur les revenus du travail. Là-aussi, en cas de contrôle, c’est au regard des kilomètres parcourus (selon l’usage du véhicule et des frais pris en charge en lien avec les barèmes fiscaux) qu’est déterminée la fiscalisation des sommes perçues ou des avantages en nature estimés (BOI RSA BASE 30 50 30 20 n° 390, 27.03.2014)

En même temps l’administration rappelle en outre, plus par analogie que par application directe, que les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l’emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet sont affranchies de l’impôt (cf. 81.1 du code général des impôts complété de la doctrine fiscale D. adm 5F-2543, n° 11, 10-2 1999, BOI RSA BASE 30 50 40 n° 280 12.9.2012).

En conclusion et en synthèse, il ressort de la position de l’administration :

  • l’intégralité des frais des membres du CSE peut être prise en compte si ceux-ci sont justifiés et ne relèvent pas de convenances personnelles ou de choix de modalités « intéressées » ou profitables individuellement à ses membres au détriment du budget social du CSE affecté aux dépenses de l’instance.

Le CSE veille à ce titre à définir les bonnes pratiques de gestion et à promouvoir, en termes de frais, un fonctionnement économe des budgets (notamment, pour celui dévolu aux œuvres sociales et culturelles). Il le fait particulièrement dans le règlement intérieur du comité ou dans des résolutions du CSE que peut approuver en séance le comité. Cela passe par privilégier les déplacements et les coûts de gestion des activités les plus faibles.

  • Le surplus de prises en charge des frais de ses membres par le CSE, celui qui dépasse des sommes normalement dues en considération des moyens mis en œuvre pour fonctionner, notamment si ceux-ci sont inadaptés ou relèvent de dépenses injustifiées, en tout ou partie, ou dépassent les plafonds d’exonération des barèmes fiscaux, cette plus-value peut être requalifiée en avantage ou rémunération, pour les membres du CSE qui s’en prévalent, passibles d’assujettissement à cotisations sociales (part patronale pour le CSE et part salariale pour le membre) et à l’impôt sur le revenu.

Les quotes-parts de sommes perçues au titre de remboursements de frais injustifiés ne peuvent pas davantage être déduites des revenus assujettis à l’impôt.

Le budget CSE et les membres concernés par le non-respect des obligations sociales et fiscales pourraient être redressés et subir des pénalités.

Nous conclurons également qu’il ne faut pas attendre d’une position des services fiscaux et d’une note juridique rappelant les règles sociales, comptables et fiscales, qu’elles mettent en exergue les tolérances que peut avoir l’administration fiscale, en cas de contestations de redressements fiscaux, dans l’appréciation d’une dépense « réelle » (par nature et montant, celui-ci restant « prix coûtant » et pour un tarif moyen) respectant les conditions et moyens d’engagement réglementaire de la dépense, ouvrant droit à la déduction fiscale ou à l’exonération et ne traduisant pas un avantage personnel, direct ou effectif particulier voire abusif ou frauduleux pour le membre du CSE.

Les plafonds des barèmes fiscaux sont des estimations et valorisations, par l’administration fiscale, d’une juste dépense à faire prendre par le budget du CSE, « charge » que le membre n’aurait pas eue, hors ses missions et fonctions de CSE.

Si le membre du CSE ne tire pas d’avantage personnel supplémentaire ou des plus-values financières d’une charge réelle, ou s’il peut justifier qu’il n’a pas pu faire autrement que de dépasser le plafond (et que cela ne relève pas de son propre choix), c’est le montant réel et complet qui peut être exonéré et défiscalisé. Cela se fait toujours a posteriori d’un contrôle social des URSSAF ou fiscal de l’administration, après contestation de l’assujetti (CSE ou/et membre) sur justificatifs de la bonne foi et par réfaction des montants redressés. Cet état des lieux est valable pour toute nature de dépenses et de justificatifs…

Dossier réalisé par le Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA

Pour toute remarque (n’hésitez pas !), personne contact : Christian HERGES, Responsable Juridique.

Pour toute question : juridique@unsa.org

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