Marchés publics : bientôt des règles européennes pour renforcer les droits sociaux ?
Alors que l’Union européenne (UE) doit faire des choix décisifs en matière de souveraineté et d’autonomie stratégique et que la Commission s’est prononcée en faveur d’un « Buy European Act » (préférence européenne), le Parlement européen a adopté début septembre un rapport sur les marchés publics. Une révision de plusieurs directives dans ce domaine est attendue début 2026.
L’achat public représente un levier économique majeur en Europe — il représente environ 14 % du produit intérieur brut et mobilise plus de 2 000 milliards d’euros chaque année. Pourtant, la manière dont les marchés publics sont souvent attribués fragilise la qualité des services et les droits des travailleurs.euses. Dans la moitié au moins des États, une part importante des marchés ne relève que du critère du prix le plus bas. Cette logique entraîne dumping social, dégradation des conditions de travail et de sécurité et précarisation des emplois. Elle favorise également le développement du travail non déclaré et l’affaiblissement des droits sociaux.
Le rapport du Parlement européen appelle la Commission à clarifier le cadre juridique et recommande aussi de limiter la sous-traitance en cascade en renforçant la responsabilité conjointe des parties et en permettant aux collectivités de reprendre en gestion directe certains services externalisés. Mais sans obligation de mise en concurrence – contrairement à ce que propose l’extrême droite. En revanche, le rapport n’engage pas clairement à l’introduction de clauses sociales et environnementales, pourtant indispensables pour rediriger un argent public souvent utilisé par des entreprises peu vertueuses.
Pour le mouvement syndical européen, « l’argent public ne doit aller qu’aux entreprises qui respectent les droits des travailleurs et la négociation collective ». La Confédération européenne des syndicats (CES) appelle la Commission à inscrire ces principes dans la révision des directives. Cette orientation est largement soutenue, tant par l’opinion publique européenne que par de nombreux experts qui dénoncent la primauté donnée au critère du prix le plus bas.
L’UNSA appuie les demandes syndicales européennes qui promeuvent la qualité des services publics, la protection des droits des travailleurs.euses et une dépense publique responsable. L’UNSA, aux côtés de la CES et de l’EPSU-FSESP (Fédération syndicale européenne des services publics), appelle la Commission à traduire ces orientations en règles claires, applicables et contrôlables :
1. (re)diriger l’argent public vers des structures qui respectent les droits des travailleurs.euses et le devoir de vigilance, qui pratiquent un véritable dialogue social et garantissent une couverture par des conventions collectives en incluant des clauses sociales et environnementales ;
2. éliminer la possibilité d’attribuer des marchés publics sur la seule base du prix et garantir des critères liés à la qualité des emplois et à la négociation collective ;
3. réglementer la sous-traitance en introduisant la responsabilité conjointe et une limite à la sous-traitance en cascade ;
4. garantir que la fourniture publique de services, les partenariats public-public ainsi que la fourniture interne de services ne soient pas remis en question.
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