Les dossiers d’un ordinateur qualifiés "personnels" ne peuvent être consultés par l’employeur à l’insu des salariés...


https://www.unsa.org/2456

Qu’en est-il du droit de l’entreprise de consulter les dossiers et répertoires d’un ordinateur d’un salarié absent et à l’insu de celui-ci ?
Cet article apporte une contribution réactualisée, celle du jugement de la Cour de cassation du 9 novembre 2022...

JURISPRUDENCE SOCIALE PRATIQUE...

° Un droit applicable en lien avec le respect de vie privée...

Selon l’article 9 du Code civil « chacun a droit au respect de sa vie privée ».

Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le respect de la vie privée s’applique également dans l’entreprise lorsque le salarié est sous la subordination de l’employeur (CEDH, 5 septembre 2017, affaire Barbulescu c./ Roumanie, n° 61496/08).

Ce droit au respect de la vie privée coexiste avec certaines restrictions inhérentes à la possibilité pour l’employeur de contrôler et de surveiller l’activité des salariés qui lui sont subordonnés pendant leur temps de travail (Cour de Cassation, Chambre sociale, 4 juillet 2012, n°11-30266).

La technologie et les outils informatiques permettent désormais une surveillance accrue par l’employeur : badges aux entrées, vidéosurveillance, contrôle des connexions internet, biométrie, géolocalisation via les téléphones professionnels…

La loi impose via l’article 1121-1 du Code du travail, que la surveillance des salariés par l’employeur soit :

  • justifiée par la nature de la tâche à accomplir ;
  • et proportionnée au but recherché.

Par ailleurs, l’article 1224-4 du Code du travail précise : « qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance ». La loyauté doit gouverner les relations entre le salarié et l’employeur et la surveillance doit avoir été préalablement portée à la connaissance du salarié.

Déclinaison opérationnelle...

Dans ce contexte et avec ce cadre juridique, l’employeur peut accéder au matériel informatique qu’il a mis à disposition du salarié, et donc : consulter les fichiers d’un ordinateur, d’une clé USB ou d’un disque dur : le caractère professionnel de ces fichiers étant présumé.
Mais, en vertu du droit au "respect à la vie privée", l’employeur n’a pas accès aux documents portant la mention « personnels ».

La simple mention « Mes documents » n’est pas jugée suffisante pour empêcher le caractère présumé "professionnel" des fichiers (Cour de Cassation, Chambre sociale, 10 mai 2012, pourvoi n° 11-13884).

Les documents personnels, provenant de la messagerie personnelle d’un salarié, mais se trouvant sur son ordinateur professionnel, restent ainsi présumés "professionnels" (Cour de Cassation, Chambre sociale, 19 juin 2013, pourvoi n° 12-12138).

Arrêt du 9 novembre 2022...

Aux termes d’un arrêt très récent, rendu le 9 novembre 2022, pourvoi n° 20-18922, notamment au visa de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme, 9 du code civil et L.1121-1 du Code du travail, la Chambre sociale de la Cour de Cassation censure l’arrêt de la Cour d’Appel qui avait rejeté des débats les pièces litigieuses en indiquant qu’elles provenaient de l’agenda personnel du salarié et que l’employeur ne justifiait pas des conditions régulières de son obtention...

Aux termes de la motivation de son arrêt la Cour indique également : «  en se déterminant ainsi, quand il n’était pas contesté que les pièces litigieuses provenaient de l’agenda électronique de la salariée, disponible sur ordinateur professionnel, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si ces pièces avaient été identifiées comme personnelles par leur auteur, la Cour d’Appel a privé sa décision de base légale.  »

Droit en actions...

Cette jurisprudence s’inscrit dans le courant d’une interprétation restrictive du droit au respect de la vie privée, favorable à l’employeur et ainsi, l’agenda électronique personnel du salarié se trouvant sur son ordinateur professionnel est "présumé professionnel dès lors qu’il n’est pas identifié comme « personnel »".

Auteur, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA

Pour toute précision ou question, juridique@unsa.org

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