Comment interpréter le texte d’une convention collective de travail ?


https://www.unsa.org/2462

Pour les salariés, le délégué syndical, le militant, comprendre les dispositions d’une convention collective de branche professionnelle ou d’entreprise reste un exercice périlleux et insécurisant, pour s’informer ou donner de l’information. Quelques pistes pour vous y aider...

COMPREHENSION DU DROIT

La Cour de cassation rappelle les modalités selon lesquelles doivent être interprétées les dispositions équivoques d’une convention collective.

De fait, doit être approuvé, un conseil de prud’hommes qui retient que les dispositions conventionnelles se limitant à exclure, de l’assiette de calcul de la prime annuelle, les heures supplémentaires exceptionnelles, la majoration pour travail effectué un jour férié, elle, devait être prise en compte pour le calcul de la prime...

JURISPRUDENCE SOCIALE DE LA COUR DE CASSATION :

A propos de l’arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2022, n° 21-15.805 et de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire...

https://www.courdecassation.fr/deci...

° DECISION DU JUGE...

Selon l’article 3.7.3 de la CCN du Commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, le montant de la prime annuelle, pour les salariés, qui n’ont pas fait l’objet d’absences autres que celles prévues par le texte, est égal à 100 % du salaire forfaitaire mensuel de novembre (heures supplémentaires exceptionnelles exclues).

En droit, le texte de la convention collective n’excluant pas expressément une majoration pour travail effectué un jour férié, cette majoration devait bien comme l’avait fait le CPH être prise en compte pour le calcul de la prime...

° Les FAITS...

Un salarié de la société Carrefour Supply Chain (convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001) a saisi la juridiction prud’homale d’une demande, au titre de rappels des primes annuelles pour les années 2017 à 2019.

Le Conseil de prud’hommes du Mans a rendu sa décision en dernier ressort en date du 12 mars 2021.

° PROCEDURE...

Le jugement a condamné l’employeur à un rappel de primes annuelles. Or, selon lui, l’article 3-7 de la Convention collective précise que « seules les majorations liées à des heures supplémentaires, à des heures de travail dominical ou à des heures de travail un jour férié régulièrement accomplies par le salarié au cours de l’année de référence peuvent être prises en compte dans l’assiette de calcul de la prime annuelle ».

Les juges devaient donc rechercher si ces heures avaient été régulièrement accomplies par le salarié au cours de l’année de référence, ou si elles n’avaient été accomplies qu’à titre exceptionnel.

En l’espèce, le salarié a sollicité ce rappel de primes annuelles et la société s’y est opposée. Pour elle, le salarié avait intégré à ses calculs, de manière erronée, les majorations liées aux heures de travail un jour férié accomplies au mois de novembre. Ces heures n’avaient été qu’exceptionnelles...

La convention prévoyant pour l’entreprise de traiter ces heures en « heures supplémentaires exceptionnelles exclues », le conseil de prud’hommes n’a pas pris la bonne décision pour l’employeur. Pour cette raison il a saisi la Cour de cassation, le conseil de prud’hommes statuant en dernier ressort.

° ECLAIRAGES :

Pour la Cour de cassation, dans le cas précis de cette convention collective, le montant de la prime annuelle, pour les salariés qui n’ont pas fait l’objet d’absences autres que celles prévues par le texte, est égal à 100 % du salaire forfaitaire mensuel de novembre (heures supplémentaires exceptionnelles exclues).

Donc le conseil de prud’hommes a retenu, à bon droit, que ces dispositions se limitent à exclure, de l’assiette de calcul de la prime annuelle, les heures supplémentaires exceptionnelles. Le CPH a exactement apprécié que la majoration pour travail effectué un jour férié devait être prise en compte pour le calcul de la prime.

Par cet arrêt la Cour de cassation rappelle de manière générale que lorsque la Convention collective manque de clarté, elle doit être interprétée :

  • d’abord comme la loi c’est-à-dire en respectant la lettre du texte ;
  • ensuite en tenant compte d’un éventuel texte législatif ayant le même objet ;
  • enfin, en utilisant la méthode "téléologique" consistant à rechercher l’objectif social du texte.

DROIT EN ACTIONS :

Cet arrêt permet le rappel d’une jurisprudence déjà bien établie, comme cela avait pu être le cas avec la CCN des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées (cf. Cass. Soc, 8 juin 2022 n° 20-20.100).

Tout change parce que rien ne change, mais les droits se confirment... A suivre donc...

Auteur, Louis BERVICK, Juriste en droit social, Pôle Service juridique, Secteur Juridique National UNSA.
Pour toute question d’interprétation : juridique@unsa.org

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