Nouvelle convention d’assurance chômage : des effets mitigés pour les demandeurs d’emploi
Les dispositions de la nouvelle convention d’assurance chômage signée par les partenaires sociaux le 15 novembre dernier entrent en vigueur à partir du 1er avril. L’Unédic a chiffré leurs effets sur le solde financier et les demandeurs d’emploi, avec des impacts en demi-teinte pour ces derniers.
Les mesures découlant de la nouvelle convention sont nombreuses. A noter que certaines n’ont pas été agréées pour des raisons juridiques. Il en est ainsi de l’instauration d’un coefficient réducteur sur le salaire de référence des travailleurs frontaliers [1] et de la réduction de la condition d’ouverture de droit pour les primo-entrants (cf.infra).
Sur la période 2025-2028, les nouvelles modalités incorporées dans le règlement d’assurance chômage permettront de réaliser 2,3 milliards d’euros d’économies budgétaires et 1,5 milliard par an en régime de croisière. Au total, 320 000 allocataires seront concernés par les différentes mesures.
Mensualisation du versement de l’allocation et plafonnement du cumul ARE / activité non salariée
70 % des moindres dépenses générées le seront par 2 dispositions. La première concerne la mensualisation du versement de l’allocation chômage. Elle ne sera plus octroyée selon le nombre de jours dans le mois mais sur la base de 30 jours chaque mois. Si le capital de droit des demandeurs d’emploi n’est pas modifié, l’effet sera, dans la plupart des cas, négatif pour les personnes qui retrouvent un emploi avant la fin de leur droit. 900 000 personnes seront touchées, avec une perte médiane de 100 euros annuels.
L’autre mesure ayant un effet financier important est le plafonnement du cumul de l’aide au retour à l’emploi (ARE) avec un revenu d’activité non salarié à 60 % du reliquat de droit. Alors qu’aucun plafond n’existait, cette disposition a été prise [2] afin de limiter les effets d’aubaine, dans un contexte où les dépenses liées à ce cumul ont fortement augmenté depuis le début des années 2010. Les économies atteindraient 840 millions d’euros en régime de croisière.
Réduction de la cotisation sociale patronale
Côté recettes, la suppression de la contribution exceptionnelle temporaire de 0,05 point de cotisations patronales, en vigueur depuis 2017, réduira les fonds de l’assurance chômage de 400 millions d’euros par an. Cette baisse de contribution entraînera, toutes choses égales par ailleurs, une baisse du financement de l’Unédic à France Travail, sachant que 11 % des recettes du régime d’assurance chômage financent le service public de l’emploi [3].
Décalage des bornes d’âge pour les séniors
D’autres mesures notables issues de cette convention sont censées s’adapter à la dernière réforme des retraites. Ainsi, la filière « sénior » commencera à partir de 55 ans au lieu de 53, ce qui conduira à réduire la durée maximale d’indemnisation de 4,5 mois pour les 53-54 ans (de 22,5 à 18 mois) et pour les 55-56 ans (de 27 à 22,5 mois). Selon l’Unédic, 40 000 personnes auront une durée d’indemnisation inférieure. De plus, en régime de croisière, 17 000 personnes ne seraient plus indemnisées, en raison également de la baisse de la période sur laquelle le droit au chômage est recherché, de 36 mois à 24 mois pour les 53-54 ans.
Les séniors seront également affectés par le décalage progressif de l’âge, de 62 à 64 ans, pour avoir accès au maintien des droits. Ce dispositif permet, sous certaines conditions, d’être indemnisé jusqu’à l’âge de départ à la retraite à taux plein, soit 67 ans au plus tard. En tout, 35 000 personnes ne verraient plus leurs droits prolongés chaque année du fait de ce décalage.
Un point positif néanmoins pour les séniors, la dégressivité des allocations chômage à partir d’un certain niveau de revenu, en vigueur depuis 2021, ne concernait pas les allocataires de 57 ans et plus. A partir du 1er avril, les personnes de 55 ans et plus en seront exemptées. 3 500 bénéficiaires seront bénéficiaires de cette mesure.
Quelques améliorations sur l’accès au droit
Plusieurs dispositions présentes dans la convention vont faciliter quelque peu l’accès au droit pour les demandeurs d’emploi. Outre l’automatisation de l’octroi de l’aide de fin de droits (AFD) ou des actualisations bénéfiques pour le versement de l’allocation décès qui n’auront pas d’incidence financière forte, les mesures principales concernent le calcul du salaire journalier de référence (SJR) ou la baisse de la condition minimale d’affiliation pour certains publics.
Ainsi, pour le calcul du SJR, les jours non travaillés pris en compte durant la période de référence seront plafonnés à 70% des jours travaillés et non plus à 75 %. Une différence infime comparée à ce qui existait avant 2021 et remis en cause par le gouvernement. Seuls les jours travaillés étaient en effet pris en compte. C’est toutefois un léger mieux qui majorera l’allocation de 150 000 demandeurs d’emploi, autour d’une médiane de 110 euros sur la durée du droit.
Par ailleurs, les saisonniers pourront ouvrir un droit à l’assurance chômage en ayant travaillé 5 mois (au lieu de 6 dans le droit commun).
L’UNSA souligne ces dernières dispositions, qui reconsidèrent en partie les reculs imposés par le gouvernement au cours des dernières années et espère qu’elles constituent un premier pas vers une amélioration plus ample des droits des demandeurs d’emploi.
S’agissant de la baisse de la condition minimale d’affiliation pour les primo-entrants, qui concernerait surtout les jeunes, l’UNSA demande à l’exécutif d’agir vite pour la transposer législativement. En effet, c’est une des mesures de la convention la plus favorable pour les droits des demandeurs d’emploi. Dans un souci d’équilibre, il est important qu’elle soit mise en œuvre rapidement, notamment dans le contexte actuel d’augmentation du chômage des jeunes.
Le gouvernement doit arrêter de faire les poches de l’Unédic
L’UNSA appelle le gouvernement à cesser de ponctionner les recettes de l’assurance chômage, tel que prévu jusqu’en 2026. Le remboursement des prélèvements réalisées en 2023 et 2024 s’impose tout autant. Ils représentent 12 milliards d’euros et pénalisent les comptes de l’Unédic.
L’Unédic l’a souligné dans ses récentes perspectives financières, ces “ponctions” vont obérer davantage le désendettement de l’Unédic dans les années à venir en raison du ralentissement économique et de l’emploi et d’autres baisses anticipées de recettes (CSG des indépendants).
Ces prélèvements, qui se traduisent par un non remboursement par l’État d’exonérations de cotisations sociales, servent à financer France compétences et France Travail, c’est-à-dire des politiques de l’emploi. Pour l’UNSA, le service public de l’emploi doit être assuré principalement par l’État et non par les fonds de l’assurance chômage. Les recettes de l’Unédic (cotisations sociales et CSG activité) doivent aider prioritairement à couvrir le risque du chômage par le versement d’une allocation. A cet égard, la recherche d’une solution pour équilibrer les comptes ne peut s’appuyer sur la diminution des droits des allocataires.
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