Vent debout contre l’avis d’inaptitude mentionnant une dispense de reclassement


https://www.unsa.org/3516

Par un arrêt en date du 3 juillet 2024, n° 23-14.227, la Chambre sociale de la Cour de cassation estime que la mention de l’avis d’inaptitude, indiquant que l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, se base sur des éléments de nature médicale, autorisant ainsi sa contestation en référé.

JURISPRUDENCE SOCIALE "INAPTITUDE"

Même s’il n’existe aucun chiffe national officiel concernant le nombre d’avis d’inaptitude rendus chaque année, le chiffre de 100 000 salariés déclarés inaptes à leur poste est habituellement évoqué.

Selon les chiffres des service de santé au travail interentreprises de 2022, les avis d’inaptitude reflètent 2,5 % de l’ensemble des visites réalisées par les médecins du travail. Le nombre de personnes concernées par ces avis d’inaptitude est estimé aux alentours de 93 900 en 2020, soit 0,6 % du nombre de salariés suivis.

L’avis du médecin du travail, que ce soit un avis d’aptitude ou d’inaptitude, reposant sur des éléments de nature médicale, peut être contesté par le salarié ou par l’employeur. La contestation tend à l’obtention d’un nouvel avis. La contestation est jugée selon la procédure accélérée au fond, soit la formation de référé du conseil de prud’hommes, qui offre rapidité et obtention de mesures précitées.

Cependant, il est parfois complexe de déterminer si l’avis repose ou non sur des éléments de nature médicale, pour bénéficier de cette procédure plus favorable.

° CONTEXTE DE LA SAISINE

Une salariée, en arrêt de travail pour maladie, a été déclarée inapte à son poste lors de sa visite de reprise. L’avis du médecin du travail soulignait que son « état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Afin de contester cet avis pour être reconnue seulement inapte à son poste et être reclassée dans l’entreprise, la salariée a saisi la juridiction prud’homale en référé.

° L’ANALYSE DE LA COUR DE CASSATION

La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi de l’employeur, qui voulait déclarer non-recevable l’action de la salariée, et s’aligne sur l’arrêt de la cour d’appel de Lyon.

La Chambre sociale rappelle tout d’abord que selon l’article L. 4624-7 du code du travail, il est possible de saisir le juge sur les avis, les propositions, les conclusions écrites et mêmes les indications émis par le médecin du travail, reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4.

Au regard des articles L 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail, le médecin du travail peut en effet ajouter à l’avis d’inaptitude des indications relatives au reclassement du travailleur et mentionner ainsi que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Cependant, l’ajout d’une telle mention constitue une indication qui se base sur des éléments de nature médicale.

Dès lors, la contestation de cette mention est recevable.

Ainsi, dans l’affaire, la Chambre sociale, tout comme la cour d’appel, constate que l’avis du médecin est établi sur des constatations médicales relatives à ses possibilités de reclassement dans l’entreprise, ce qui offre la possibilité de contester cet avis. Dès lors, en rejetant le pourvoi de l’employeur, la Chambre sociale conclut que la salariée est bien légitime à contester cet avis.

° ÉCLAIRAGES

La Chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que la contestation ne porte pas uniquement sur le sens de l’avis délivré par le médecin du travail, soit l’aptitude ou l’inaptitude, mais porte également sur le contenu de l’avis.

La Chambre sociale délivre alors de nouvelles précisions pour repérer les éléments de nature médicale, conditions sine qua non pour la recevabilité de l’action en référé. Ainsi, elle expose que la contestation de la mention de la dispense de reclassement en raison de l’état de santé du travailleur s’inscrit bien dans le domaine prévu légalement et que l’action est de ce fait bien recevable.

° DROIT EN ACTIONS

Le salarié, qui n’est pas d’accord avec l’avis du médecin du travail, peut conster l’avis en référé, s’il repose sur des éléments de nature médicale, ainsi que les propositions, les conclusions écrites ou les indications émis par le médecin du travail.

Par exemple, si le médecin du travail estime dans son avis que le salarié n’a pas besoin d’une chaise ergonomique du fait de son état de santé, le salarié peut contester cet avis en référé.

La contestation de l’avis du médecin du travail doit faite devant le conseil de prud’hommes, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l’avis. Il s’agit d’un délai très court, qui exige une prise de décision rapide. En effet, passé ce délai, la contestation devient irrecevable.

Auteure, Jade EL MARBOUH, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA.
Pour toute remarque, juridique@unsa.org.

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