Accord franco-britannique sur les migrants : un dispositif inefficace et contraire aux droits humains
Un accord franco-britannique a été signé fin juillet visant à prévenir « les traversées périlleuses » en Manche. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a rendu le 14 octobre un avis très critique sur ce texte. L’UNSA dénonce également un accord inefficace, qui ne règle rien et ne produira sans doute pas les effets escomptés.
Le texte prévoit le renvoi en France de migrant.es arrivé.es au Royaume-Uni par petits bateaux (small boats) « suite à une traversée périlleuse », en échange de l’envoi outre-Manche de façon régulière de migrant.es présent.es sur le sol français. Ce dispositif expérimental, surnommé « one in, one out » — un qui entre, un qui sort — a pour objectif de dissuader les arrivées illégales et de démanteler les réseaux criminels de passeurs. L’accord serait applicable jusqu’en juin 2026, date prévue pour l’entrée en vigueur du Pacte européen sur la migration et l’asile.
En contrepartie, le texte prévoit de faciliter certaines formes de migration légale vers le Royaume-Uni, permettant à des personnes se trouvant en France de déposer une demande d’admission légale. Cependant, il n’est pas prévu que les personnes transférées bénéficient d’un statut régulier durable : elles ne disposent que d’un visa temporaire de trois mois et devront, une fois sur place, engager des démarches pour obtenir un titre de séjour ou déposer une demande d’asile.
Dispositif cynique en réponse à une réalité tragique
Les chiffres récents illustrent l’ampleur du phénomène. Au premier semestre 2025, près de 20 000 migrant.es ont traversé la Manche — un record depuis 2022, année où plus de 45 700 exilé.es avaient rejoint le Royaume-Uni. L’année 2024, quant à elle, a été la plus meurtrière recensée depuis 2018 : 78 décès recensés dans une vingtaine de naufrages, selon l’Office de lutte contre le trafic illicite de migrants.
Le mécanisme instauré par cet accord s’apparente à une forme de marchandage d’êtres humains. Il crée un système particulièrement cynique et déshumanisant, où la possibilité pour une personne d’émigrer légalement vers le Royaume-Uni dépend de l’expulsion d’une autre, ayant risqué sa vie lors d’une traversée à l’aide de passeurs. Le droit d’asile s’en trouve instrumentalisé et vidé de son sens.
La CNCDH estime qu’environ cinquante personnes par semaine pourraient « bénéficier » de ce dispositif d’arrivée légale en Angleterre — un chiffre dérisoire au regard de la situation et qui rend illusoire tout effet dissuasif. Par ailleurs, le texte est très vague quant au sort des personnes renvoyées en France, laissant une large place à l’arbitraire.
Pour une politique migratoire européenne juste et humaine
L’UNSA s’associe à la position ferme et critique de la CNCDH. Cet accord doit être dénoncé par le nouveau gouvernement et ne saurait être renouvelé lors de la mise en œuvre du Pacte sur la migration et l’asile. Il est essentiel de rappeler que l’immigration, et plus encore l’exil, ne sont jamais un choix, mais bien souvent une nécessité dictée par la guerre, la misère ou la persécution.
Conformément à sa résolution générale, l’UNSA réaffirme qu’elle « milite, aux côtés de la CES, pour que les États membres de l’Union européenne (UE) se mettent d’accord sur une politique de migration et d’asile équitable, prennent en charge le sauvetage de personnes en danger en mer et permettent aux migrant·es de demander l’asile dans le pays de leur choix. À ce titre, une négociation sur la révision du règlement de Dublin doit voir le jour. En effet, « le système de Dublin » est celui qui permet de définir quel pays est le plus à même d’accueillir une demande d’asile. Il oblige ainsi, dans la plupart des cas, un individu à déposer sa demande dans son pays d’arrivée sur le territoire de l’UE, sans lui laisser le choix du pays dans lequel il souhaite se rendre in fine ».
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